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PARIS 20è : EXPOSITION PAUL MAHEKE "DIABLE BLANC" A LA GALERIE SULTANA


Du 24/04/2019 au 25/05/2019
Galerie Sultana, 10 rue Ramponneau, 75020 PARIS



Du 24 avril au 25 mai 2019,

 

Paul Maheke

"Diable Blanc"

 

Pour sa seconde exposition personnelle à la galerie Sultana, Paul Maheke livre un titre sur lequel on ne peut que s’arrêter. Il faut alors choisir d’ouvrir ou non la boîte de pandore. Abandonner les certitudes pour potentiellement se laisser embarquer vers des abysses. Là où, peut être, dans la fabrique de l’inconscient collectif occidental, ce qui est à voir ne nous plaira pas. Là où les croyances côtoient les archétypes, et où les peurs les plus profondes déjouent la linéarité de l’histoire dans des apparitions répétées. Précisons ici qu’il ne s’agit que d’une spéculation, Paul m’ayant livré ce titre comme un clin d’oeil au sens multiple et opportun. Diable Blanc…une évocation qui va à l’encontre de siècles d’iconographie chrétienne. Affirmer que l’association entre la couleur noire et le mal est une constante relève de l’évidence, allant des représentations du diable de l’Europe médiévale jusqu’aux sorcières pratiquant la magie noire. L’histoire abonde d’exemples de raccourcis nés de cette association, comme aux débuts de l’Amérique coloniale, lorsque les immigrants britanniques multiplient les accusations de sorcellerie. À la fin du 17e siècle à Salem, le diable semble être partout ; et bien qu’il prenne tour à tour la forme d’un juif ou d’un chien, les textes pointent surtout des incarnations du mal dans des corps noirs et autochtones, et donc une assimilation quasi systématique des deux. Les persécutions se justifient ainsi dans la défense d’une colonie du peuple de dieu en territoire satanique*.

Ces dernières années, le travail de Paul Maheke a fait surgir des territoires colorés composés d’apparitions et de présences. Comme pour se soustraire au régime du visible et de ses catégorisations, elles se manifestent de façon multiple et insaisissable, dans la fluidité d’espaces transitionnels, entre les images, les textes et les objets. Elles se noient dans la lumière et s’échappent dans les fissures soniques d’un réel-suggéré par l’artiste comme un tiers lieu d’émancipation que la représentation ou les mots ne fixent pas. Lorsque le corps apparaît, c’est souvent le sien, ou celui de collaborateurs ou collaboratrices devenu·e·s les hôtes de cette multiplicité, de ces temporalités en rupture, et de ces espaces que dessinent des gestes improvisés.

Cette fois-ci, en revanche, aucun corps ne se manifestera en chair et en os aux visiteur·euse·s de Diable Blanc. Les figures humaines viendront s’inscrire dans la matière, en plein jour et en toute transparence, comme un instantané de tourment, ou la trace d’un effroi dont on ne saurait nommer la cause. Leur entrée dans le domaine de la représentation est-elle de mauvaise augure ? Comme le serait la vision d’une chouette en plein jour ? Annonceur de trépas, compagnon du démon et de la tromperie, mais aussi symbole de sagesse et perspicacité, c’est bien celle-ci qui nous accueille de son regard rond, capable de voir avec clarté au coeur de la nuit. L’oiseau émerge d’un fond bleu azur imprégnant l’atmosphère de la galerie et rappelle, peut être, à quel point une petite quantité de ce pigment pourtant foncé pourrait donner l’illusion de plus de blancheur sur une surface. Ces confusions et inversions de valeurs et de chromie traversent Diable Blanc. Deux mots, il faut le rappeler, qui sont également une métaphore historique du système d’oppression systémique construit par la blanchité… de la colonisation, à Jim Crow, jusqu’aux violences policières contemporaines. White Devil, ce diable blanc, est donc un personnage qui ne vieillit pas ; il traverse l’histoire de ses apparitions, réaffirmant une domination qui n’est pas restée l’apanage du blues du Vieux Sud.

C’est précisément vers cette fin de siècle que nous emmène aussi Paul Maheke. Car au moment où le blues se développe dans les communautés Africaines-américaines du Sud des Etats-Unis, puisant dans les mythes romantiques faustiens, dans les chants de travail des plantations, et dans les traditions populaires américaines et d’Afrique de l’ouest, l’Europe vit quant à elle un racisme fin de siècle basé sur une transposition du Darwinisme dans les sciences humaines. On catégorise, et on tente avec ambition de décrire et de représenter la société humaine avec la précision de la zoologie. On s’intéresse au social comme on s’intéresse au médical, cherchant l’organique dans le mental. Cette fin de siècle est un passage, comme l’est le travail de nombre d’artistes, qui hantent les traits que les corps des oeuvres de Paul Maheke ont choisi d’habiter. On pense à ces artistes qui à la fin du 19e siècle continuent comme leurs mentors à aller chercher la vérité dans l’observation au grand jour des sous bois de Barbizon. On pense à la crise du naturalisme, à la montée en puissance du symbolisme…à des artistes comme Carlos Schwabe, illustrateur de Mallarmé, Michel Fingesten et ses gravures si prophétiques, et bien sûr, à Redon.

Redon, ce maître de la représentation de la lutte entre l’ombre et la lumière, qui semble capable de faire émerger de nouveaux territoires de l’inconscient dans chacune de ses oeuvres. Un artiste dont l’imaginaire wagnériste s’est nourri d’un ailleurs apatride, fantasmé entre la Louisiane de sa mère créole, et l’île de la Réunion de sa femme. Une quête qui, dans un environnement où la critique naturaliste nourrit les nationalismes, finit par basculer vers la couleur et « le surnaturel de la nature ».

C’est donc bien aux racines des désirs de conquêtes et de compréhension du monde que nous emmène Paul Maheke, aux confins de visions chromatiques menant parfois à l’abject ; entre désir de transparence, d’ordre, d’ombre et de lumière. Dans des vibrations où les opposés communiquent et où ce qui est invisible n’est pas forcément intangible, Paul Maheke nous propose ici d’explorer les possibilités représentationnelles d’une autre forme de corporéité. Celle, peut être, décrite par Ralph Elisson dans son roman Homme invisible, pour qui chantes-tu ?(1952) et que Fred Moten** invoque comme une profonde invisibilité qui porterait la visibilité en son sein. Car ce qui est invisible ici est profondément matériel, épidermique, acoustique, en surface et en dessous. 

Céline Kopp

 

Notes: 
* Cotton Mather, théologien puritain,The Wonders of the Invisible World. Observations As well Historical as Theological, upon the Nature, The Number, and the Operations of the Devils. (1693). 
** Fred Moten, In the Break: The Aesthetics of the Black Radical Tradition, 2003 

 




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