Exposition - Andé
Le Journal d'Elbeuf - 07/10/2008
C'est à deux artistes de Cherbourg que le Moulin offre, pour trois semaines, le hall de son théâtre. La plasticienne travaille autour du livre tandis que le peintre
s'intéresse aux rapports de l'Homme et de la Nature.
Hôtes de l'Usine de Jean Zabukovec, à Saint-Germain-des-Angles près d'Evreux, Florane Blanche et BemardOrange seront également présents au Théâtre du
Moulin d'Aude où ils exposent
leurs œuvres du 11 au 31 octobre.
Travaillant l'un et l'autre dans la
région de Cherbourg, les deux artistes ont assez de complicité entre eux pour pouvoir associer
leurs travaux. Nous avions découvert Florane Blanche dans sa petite galerie de Cherbourg. Quant à Bernard Orange, il a récemment
fait l'objet d'une pétillante exposition dans tes locaux de l'agence
Epsilon, à Saint-Etienne-du-Rouvray, événement à la suite duquel
nous nous étions rendus jusqu'à
son atelier. Ce que ces deux artistes ont en commun réside dans
leur approche plutôt ludique de
leur sujet.
Amoureuse des livres
Rorane Blanche associe souvent ses travaux à la poésie. Elle crée aussi des livres objets qui vivent
d'une vie autonome. Certains d'entre eux ressemblent à
des fleurs ouvertes ou des papillons silencieux. On ne peut pas
forcément les feuilleter, mais ils
suscitent le rêve par leur présence, leur fantaisie et leur polychromie. « Les matérieux déjà me font en eux-mêmes voyager, explique Florane. J'y associe aussi L'idée de traces et de transmission. Dans mes
travaux, plusieurs couches de vie se
superposent et se confrontent.» Ainsi les livres de la plasticienne
deviennent-ils les vecteurs d'une émotion particulière dont chacun
s'approprie librement les effets.
Mais Florane Blanche est d'abord
peintre. Le papier trouve chez elle
un emploi féerique. Son approche
si particulière des couleurs
comme des texrures - elle pratique
le collage et la technique mixte -
donne naissance à un an précieux, délicat, intimiste. Ses œuvres ont l'air de chuchoter, de
nous raconter une histoire,
comme celles que les anciens livraient au coin du feu. Car Florane est aussi et surtout un poète,
qualité qui, selon nous, fait toute
la différence.
Caustique et drte
En ce qui concerne Bernard
Orange, sa peinture est l'aboutissement d'un certain cheminement personnel. Humoristique dans l'âme, il pratique un art voué à faire réfléchir. Il n'est pas pour cela nécessaire de faire des discours. Un dessin quelquefois vaut plus qu'une démonstration. Orange est un imagier. Fidèle à un certain esprit français, ce franc-tireur cultive le sens critique, qualité dont les dessinateurs de presse savent encore faire usage. Grand lecteur de journaux satiriques, Orange aime se moquer de son époque, si folle, si prompte à lui donner du grain à moudre. La relation de l'Homme à son environnement l'intéresse au tout premier chef. On ne s'étonnera pasde son affection pour Jacques Prévert, dont il était presque le voisin. Rappelon que le poète habitait près de la Hague, non loin du site où s'est construite une usine un peu encombrante. Elle retraite, comme chasun sait, certains déchets radioactifs. Prenant en compte l'environnement et ses mutations inquiétantes, Orange nous propose sa vision de l'avenir : «Par suite du réchauffement de la planète, les usines pieds dans l'eau, dit-il, remplaceront le usines clés en main. » Pour celles qui n'auront pas mis le trousseau sous la porte, cela risque d'être la fête. Bernard Orange s'exprime par métaphores. Les oiseaux sont pour lui de curieux intercesseurs. On dirait même qu'ils nous ressemblent...
Luis Porquet