En
Pierre GODET l'homme et l'artiste ne font qu'un : solide, bien planté
sur une terre rurale et normande de la vallée de Cailly, il représente
et il est profondément le peintre cordial, de bonne compagnie,
sachant allier le plaisant avec le sérieux pour le meilleur de
son art et de sa vie.
Autour
de ses plages, de ses terrasses, de marchés animés et de
scènes urbaines, d'une peinture émerveillée, Pierre
GODET poursuit une vocation artistique chaleureuse, magnifiée de
couleurs magiques et de lumière bienheureuse. Son contact avec
la nature lui offre d'incessantes redécouvertes marquées
d'une puissance expressive qui témoigne d'un quotidien revu par
l'excellence de la vie et de la beauté pure et simple d'un environnement
généreux à qui désire le capter et le transmettre
magistralement comme le sait Pierre GODET.
Soleil,
grisaille, de nuit ou de jour, en toutes saisons, sa touche est sensible,
ses couleurs sont pures, gorgées de vitalité par l'excellence
d'un métier et d'une émotion qui préservent pourtant
l'impact d'une maestria accomplie au service d'œuvres proches des
sens et de l'esprit.
André RUELLAN,
critique d'art
La ferveur du trappiste isolé du monde
(…)La réserve naturelle de Pierre Godet
- il ne fut et ne sera jamais carriériste - lui a dessiné
un itinéraire en escargot, de l'extérieur jusqu'à
son centre : New York, Bruxelles, Le Havre, Dieppe, Cherbourg, New York
et Le Havre... Il faudra attendre 1982 pour le trouver enfin seul à
Rouen, sur les cimaises de la galerie Rollin.
Pierre Godet est fauve parmi les fauves mais en dehors
de la cage.
Cependant, l'audace de sa palette, l'affrontement des tons que lui impose
le motif, et qu'il refuse d'adoucir, le maintiennent auprès (…)
de Van Gogh, Marquet (…), Derain, Vlaminck, Van Dongen… voire
de l'azuréen Raoul Dufy, dans le souci du cadrage, ou d'Alechinski,
dans la soif de lyrisme. (…)
(…) Peindre est pour lui une nécessité,
une "obsession" de tous les instants, alimentée par l'exigence
de la sincérité qui s'élève sans cesse contre
les petites habitudes, les "coups de pattes", les à-peu-près.
Chaque toile incarne le nouvel adversaire de son combat
solitaire qu'il empoigne comme un lutteur sous le soleil ou dans le froid.
(…) Il y a chez Pierre Godet la ferveur du trappiste isolé
du monde pour mieux serrer l'univers réel dans ses bras.
Daniel FLEURY,
critique d'art
Pierre GODET : Entre cent et mille
"Une toile de Pierre Godet se reconnaît entre cent"
François Bergot
(Conservateur en chef des Musées de France)
C'est le plus beau des compliments qui puisse être
fait à un artiste. François Bergot, qui oeuvra tant pour
le rayonnement des musées de Rouen, mais aussi - générosité
rare - pour l'encouragement et le soutien des peintres authentiques dans
la cité, mesurait bien le poids de ses mots. Il lui rappelait encore,
mais à nous aussi, de "toujours se souvenir que tout est
écriture" .
Ses soixante ans sonnant glorieusement, notre ami ne l'oublie pas. Le
style et l'homme ne font qu'un et il n'est en art de véritable
créateur que celui qui a la grâce, que je crois accordée,
de révéler de nouveaux signes à l'humanité
pour aller vers le beau et le vrai confondus. Regardez Miro, ce jardinier
d'étoiles, ou Braque et ses oiseaux d'éternité.
Je ne prends pas ces noms au hasard. Pierre Godet les a dans le coeur
autant que Wassily Kandinsky, l'un des plus grands initiateurs de l'art
abstrait qui affirmait que l'art véritable ne peut atteindre le
beau que s'il alimente de la moralité intérieur de l'artiste.
Curieusement, ces trois génies ne sont pas ce qu'il est convenu
d'appeler des peintres figuratifs. Or Pierre les aime et s'en alimente
bien plus que les impressionnistes et tous les "post"
de plus ou moins grandes sincérités.
Alors, pourquoi cette facilité de lecture que toute la critique
se plaît à louer : fraîcheur, vitalité, spontanéité,
goût de la fête, soif de vacances ?
J'ai rencontré pour la première fois Pierre Godet il y a
vingt ans. C'était hier, au Havre.
Car, par modestie sans doute, ce n'est pas à Rouen qu'il osa organiser
sa première exposition personnelle. Sa réserve naturelle
- il ne fut et ne sera jamais carriériste - lui a dessiné
un itinéraire en escargot, de l'extérieur jusqu'à
son centre : New York, Bruxelles, Le Havre, Dieppe, Cherbourg, New York
et Le Havre... Il faudra attendre 1982 pour le trouver enfin seul à
Rouen, sur les solides cimaises de la galerie Rollin.
Mais déjà, en cette année 1980, dans la galerie havraise
animée par Corinne Le Monnier, tout était parfaitement en
place. Nous pouvions déjà en témoigner : "Pierre
Godet n'a aucunement besoin de raconter sa peinture. Elle parle d'elle-même
sans le moindre mensonge, sans artifice, sans faux-semblant. Godet est
naturellement peintre, naturellement figuratif. Pourtant son regard reste
très personnel. La raison ? Il est le premier à la donner
tout simplement : il aime à être tranquille quand il peint.
Du coup, cherche-t-il un endroit à l'écart, souvent en surplomb.
Et c'est ainsi placé qu'il regarde tout à loisir la vie,
la foule, les gens à la terrasse des cafés ou la manoeuvre
des grands remorqueurs. Sans doute n'est ce pas systématique. C'est
l'occasion qui fait le refuge du peintre (1). Mais il y a dans cet aimable
penchant à contempler plutôt vers le bas une évidente
tendresse..."
L'auteur persiste et signe. Mais à le retrouver souvent et toujours
avec un bonheur plus affirmé, il lui faut ajouter bien d'autres
réflexions.
D'abord son dessin se veut rigoureux. Il doit, je crois, cette discipline
à son professeur Savary. Rigoureux, cela veut dire sans la moindre
tricherie. C'est le témoin sans faille d'un instant sous le soleil
qui accuse les traits et dans l'ombre qui allonge les formes. On sait
depuis Monet et ses cathédrales ce qu'il en est du cycle des lumières
et de son impression sur l'âme de poète. La philosophie,
la poésie et la peinture ne font qu'un au coeur de l'artiste véritable.
On reconnaîtra les lieux où il a planté son chevalet
sans le moindre doute, comme familiers à nos découvertes
personnelles, mais il s'y ajoutera, à la rencontre de sa toile,
autre chose : le regard du peintre qui enjoliva définitivement
nos souvenirs. Désormais, la ligne de partage sera impossible à
matérialiser. A notre vision s'ajoutera ce qu'il nous donne de
vibration et je crois que beaucoup se plairont à prendre plaisir
en allant "voir ce, qu'il a vu" et qu'ils n'ont pas
encore saisi. Voyez Monet et son "Impression soleil levant"
(1872) que l'on se surprend à rechercher sur le port du Havre,
ou, plus près de sa manière, "La plage à
Trouville" (1870) inondée de soleil et imprégnée
de brise. On s'y retrouve ensemble.
Ensuite, ses couleurs. Il est fauve parmi les fauves mais en dehors de
la cage. Cependant, l'audace de sa palette, l'affrontement des tons que
lui impose le motif, et qu'il refuse d'adoucir, le maintiennent près
des barreaux d'or et de bronze des plus grands : Van Gogh, Marquet (son
"Boulevard de l'Yser sous la neige" n'est -il pas de
la même veine que le "Quai Conti" du vieux maître
?), Derain, Vlaminck, Van Dongen... voire l'azuréen Raoul Dufy
dans le souci du cadrage, ou le cobra Alechinski dans la soif de lyrisme.
Facile de faire avec tous ceux-là ? Vous en avez de bonnes !
Non, la démarche créative de Pierre Godet n'est pas facile.
Elle est pour lui une nécessité, une "obsession"
de tous les instants, alimentée par la douloureuse exigence de
la sincérité qui s'élève sans cesse contre
les petites habitudes, les "coups de pattes", les à-peu-près.
Chaque toile est le nouvel adversaire de son combat solitaire qu'il empoigne
comme un lutteur sous le soleil ou dans le froid. Il est aux ordres de
son âme et de son corps. Ce n'est qu'après cet affrontement
éprouvant sur le champ, qu'il achèvera, à l'atelier,
sa victoire sur le réel. Afin d'accorder à sa nouvelle captive
sa vraie vie. Dans le souffle divin de la création. Il y a chez
Pierre Godet la ferveur du trappiste isolé du monde pour mieux
serrer l'univers réel dans ses bras. De là ce regard d'humanité.
Et c'est pourquoi son écriture faite de pleins et de déliés
d'unique ordonnance se lit avec tant d'aisance. Mais au-dessous du jaillissement
des couleurs, voyez la caresse du pinceau qui cherche à contenir
la balafre du couteau, ce constant et douloureux affrontement entre le
bien et le mal des enfantements revendiqués pour toujours.
Oui, Pierre Godet est fécond. Et nous attendons encore beaucoup
de lui. On le reconnaît entre cent... et mille et c'est à
chaque fois un nouvel enchantement. Qu'il soit assuré que nous
serons toujours plus nombreux à l'accompagner sur la route qu'il
s'est tracée résolument parmi nous.
Daniel Fleury
(1) J'ajouterai aujourd'hui qu'il a
ce don extraordinaire, semblable à celui de Gaston Sébire,
de dénicher d'un seul coup d'oeil l'angle qui lui permet de remplir
sa toile sans le moindre subterfuge et sans aucun mensonge.